Vivre heureux ?
Tout est dans le regard qu’on porte sur la chose et sur l’être, dans l’espace du temps et… de la terre qui nous porte.
Avoir les pieds sur terre, être d’ici ou d’ailleurs, aller ici ou là, personne n’y échappe à un moment donné, le propre de la vie est bien de nous attacher quelque part. La ficelle est plus ou moins longue, plus ou moins solide, mais elle est là dans l’écheveau d’une société qui nous lie parmi d’autres ; d’autres qui vont tirer sur la ficelle dans le même sens ou vers ailleurs, contrarier nos envies ou contribuer à de plus belles découvertes partagées…
Avoir la tête dans les nuages, c’est l’évasion d’un monde qui assigne à résidence dans la contingence des autres. Les paupières closes, c’est le miroir de soi que notre main nous tend, quand le regard s’approche pour tenter de comprendre et retrouver le sens de ce petit détail qui avait fait basculer l’avenir d’un instant, le résultat du geste, la magie du regard… C’est le temps des petits moments qui, bonheur-malheur, se portent en secret au creux des pages d’un journal intime ; les autres ne comprendraient pas, sauf un autre peut être pour peu qu’on l’ait alors tout près de soi pour partager en secret.
Et parfois en entrant par la porte du fond dans le grand musée de notre vie, le regard s’éloigne et le champ s’élargit pour tenter de comprendre ce qui a gouverné le grand itinéraire. Dans le temps long de la traversée, les vents sont parfois contraires et il nous faut virer de bord pour continuer d’avancer droit au prix d’efforts et de calculs compliqués… Et parfois le courant nous porte, invitation facile à la paresse qui fera accoster sur un rivage éloigné de nos intentions premières. A bien y regarder c’est un peu comme au hasard de la galerie quand le regard s’arrête devant la toile ; le regard se fige un instant à l’intérieur du cadre, puis s’en va plus loin par-delà l’horizon du chemin, et de l’eau et des bois, traversant le regard de la Joconde qui nous y conduit. Comme nous elle est quelque part et c’est là que nous la rencontrons en la contemplant.
De toutes les façons le passé occupe notre temps, envahit un présent déjà peuplé d’à venir. C’est un peu comme le jeu des plans qui s’empilent dans la profondeur du paysage ; il n’y aurait pas de premier plan sans ceux qu’il nous cache un peu et qu’il rejoindra bientôt en fond dès que nous aurons avancé à reculons pour découvrir ce qui était derrière nous jusqu’alors.
C’est dans le plan large de notre passé que s’inscrit notre existence sociale, et les temps forts de la vie sont un peu comme les cailloux blancs du Petit Poucet, ils jalonnent un parcours qui nous a conduit parmi d’autres dans les temps du partage et de la rencontre avec d’autres gens, en d’autres lieux en d’autres temps. Ce sont ces moments-là qu’on va mettre en conserve dans l’album photo ou qui émailleront le récit qu’on va faire à nos petits-enfants… C’est notre histoire inscrite dans notre temps et sur notre terre…
C’est en quittant cette scène ouverte sur la salle et la lumière des autres, en coulisse dans le dédale de notre mémoire, cachés sur l’étagère d’en-haut que se conservent d’autres souvenirs bijoux, ceux qu’on ne porte que pour soi, devant le miroir de psyché. Ce monde du secret est l’autre moitié de l’être. Beaucoup l’ont oublié, qui par paresse ou par indifférence, en s’imaginant qu’il suffit de paraître dans le regard des autres pour être soi. Paradoxalement il faudra bien construire cet univers intime pour reconnaître en l’autre un autre je que soi.
L’un ne va pas sans l’autre et pourtant…
C’est au carrefour des deux mondes que la magie de la création s’opère comme une forme de catalyseur produisant la rencontre des êtres et leur attachement.
La création, l’ouvrage, le fait, l’événement n’est pas nécessairement l’œuvre de l’un ou de l’autre, il suffit de la réunion des présents, de l’un, de l’autre et de l’objet transactionnel pour faire le lien. Le fait catalyseur de la rencontre prend toutes les formes imaginables, de l’apparence concrète du goût d’un mets partagé à la table d’un dîner, à l’idée d’une utopie gambergée, aux harmonies d’une toile ou d’une mélodie, au geste d’une main tendue ou de regards qui se croisent en dansant…
Le temps est aussi paradoxal que les rencontres qu’on y fait, les réussites n’en sont vraiment qu’à la lumière des échecs, comme le jour ne se lève qu’après avoir triomphé très provisoirement d’une nuit dont il n’imagine pas le prochain retour. Le « je » ne va pas sans « toi », pas plus que le « nous » sans « l’autre », peut-être pour longtemps, toujours quelque part, ni trop étranges ni tout à fait semblables.
C’est ce qui fait la différence entre la vie et la foi et qui autorise peut-être une approche du bonheur qui ne se conjuguerait qu’au pluriel et aux présents qui se succèdent, dès lors qu’on fait quelque chose, et qu’on a assez d’estime envers quelqu’un pour espérer ensemble.
...
Avoir les pieds sur terre, être d’ici ou d’ailleurs, aller ici ou là, personne n’y échappe à un moment donné, le propre de la vie est bien de nous attacher quelque part. La ficelle est plus ou moins longue, plus ou moins solide, mais elle est là dans l’écheveau d’une société qui nous lie parmi d’autres ; d’autres qui vont tirer sur la ficelle dans le même sens ou vers ailleurs, contrarier nos envies ou contribuer à de plus belles découvertes partagées…
Avoir la tête dans les nuages, c’est l’évasion d’un monde qui assigne à résidence dans la contingence des autres. Les paupières closes, c’est le miroir de soi que notre main nous tend, quand le regard s’approche pour tenter de comprendre et retrouver le sens de ce petit détail qui avait fait basculer l’avenir d’un instant, le résultat du geste, la magie du regard… C’est le temps des petits moments qui, bonheur-malheur, se portent en secret au creux des pages d’un journal intime ; les autres ne comprendraient pas, sauf un autre peut être pour peu qu’on l’ait alors tout près de soi pour partager en secret.
Et parfois en entrant par la porte du fond dans le grand musée de notre vie, le regard s’éloigne et le champ s’élargit pour tenter de comprendre ce qui a gouverné le grand itinéraire. Dans le temps long de la traversée, les vents sont parfois contraires et il nous faut virer de bord pour continuer d’avancer droit au prix d’efforts et de calculs compliqués… Et parfois le courant nous porte, invitation facile à la paresse qui fera accoster sur un rivage éloigné de nos intentions premières. A bien y regarder c’est un peu comme au hasard de la galerie quand le regard s’arrête devant la toile ; le regard se fige un instant à l’intérieur du cadre, puis s’en va plus loin par-delà l’horizon du chemin, et de l’eau et des bois, traversant le regard de la Joconde qui nous y conduit. Comme nous elle est quelque part et c’est là que nous la rencontrons en la contemplant.
De toutes les façons le passé occupe notre temps, envahit un présent déjà peuplé d’à venir. C’est un peu comme le jeu des plans qui s’empilent dans la profondeur du paysage ; il n’y aurait pas de premier plan sans ceux qu’il nous cache un peu et qu’il rejoindra bientôt en fond dès que nous aurons avancé à reculons pour découvrir ce qui était derrière nous jusqu’alors.
C’est dans le plan large de notre passé que s’inscrit notre existence sociale, et les temps forts de la vie sont un peu comme les cailloux blancs du Petit Poucet, ils jalonnent un parcours qui nous a conduit parmi d’autres dans les temps du partage et de la rencontre avec d’autres gens, en d’autres lieux en d’autres temps. Ce sont ces moments-là qu’on va mettre en conserve dans l’album photo ou qui émailleront le récit qu’on va faire à nos petits-enfants… C’est notre histoire inscrite dans notre temps et sur notre terre…
C’est en quittant cette scène ouverte sur la salle et la lumière des autres, en coulisse dans le dédale de notre mémoire, cachés sur l’étagère d’en-haut que se conservent d’autres souvenirs bijoux, ceux qu’on ne porte que pour soi, devant le miroir de psyché. Ce monde du secret est l’autre moitié de l’être. Beaucoup l’ont oublié, qui par paresse ou par indifférence, en s’imaginant qu’il suffit de paraître dans le regard des autres pour être soi. Paradoxalement il faudra bien construire cet univers intime pour reconnaître en l’autre un autre je que soi.
L’un ne va pas sans l’autre et pourtant…
C’est au carrefour des deux mondes que la magie de la création s’opère comme une forme de catalyseur produisant la rencontre des êtres et leur attachement.
La création, l’ouvrage, le fait, l’événement n’est pas nécessairement l’œuvre de l’un ou de l’autre, il suffit de la réunion des présents, de l’un, de l’autre et de l’objet transactionnel pour faire le lien. Le fait catalyseur de la rencontre prend toutes les formes imaginables, de l’apparence concrète du goût d’un mets partagé à la table d’un dîner, à l’idée d’une utopie gambergée, aux harmonies d’une toile ou d’une mélodie, au geste d’une main tendue ou de regards qui se croisent en dansant…
Le temps est aussi paradoxal que les rencontres qu’on y fait, les réussites n’en sont vraiment qu’à la lumière des échecs, comme le jour ne se lève qu’après avoir triomphé très provisoirement d’une nuit dont il n’imagine pas le prochain retour. Le « je » ne va pas sans « toi », pas plus que le « nous » sans « l’autre », peut-être pour longtemps, toujours quelque part, ni trop étranges ni tout à fait semblables.
C’est ce qui fait la différence entre la vie et la foi et qui autorise peut-être une approche du bonheur qui ne se conjuguerait qu’au pluriel et aux présents qui se succèdent, dès lors qu’on fait quelque chose, et qu’on a assez d’estime envers quelqu’un pour espérer ensemble.
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